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44. Бессознательное и процессы психологических преобразований в условиях психоанализа Д. Видлохер (Inconscient et processus de changement en psychanalyse. Daniel Widlocher)

44. Inconscient et processus de changement en psychanalyse. Daniel Widlocher

Universite Pierre et Marie Curie (Paris VI). Hopital de la Salpetriere, France

La psychanalyse, tant comme methode psychotherapique que comme moyen d'investigation de la personnalite, se donne pour objet certains change-ments de comportement. Ces changements sont habituellement decrits en reference a la notion d'inconscient. Une part de la pathologie du comportement et de la souffrance humaine tient aux effets des intentions et des representations psychiques inconscientes dont la redecouverte par le patient permet la dissolution du symptome. C'est a propos de symptomes hysteriques que le fait fut, pour la premiere fois, mis en evidence par Breuer et Freud (1893) ("Nous fumes tres surpris a l'origine de decouvrir en effet que chacun des symptomes hysteriques disparaissaient immediatement et sans retour quand on reussissait a mettre en pleine lumiere le souvenir de l'incident declanchant, done a eveiller l'affect lie a ce dernier et quand ensuite le malade decrivait ce qui lui etait arrive de fagon fort detaillee et en donnant a son emotion une expression verbale". Breuer et Freud - "Etudessur l'hysterie"). A la même epoque, P. Janet fit egalement l'observation, mais n'en poursuivit pas directement l'etude.

On le sait, cette coincidence n'a rien de fortuit: la pratique de la suggestion sous hypnose, l'etude le la psychologie de l'hysterie (Charcot) contribuerent a la decouverte. Comme toute observation scientifique, il s'agit la de la constatation d'une transformation, spontanee ou provoquee, qui relie la conscience d'un souvenir et la production d'un symptome. Le symptome se produit quand le souvenir est dissimule. Le symptome disparait quand le souvenir reapparait. Les faits nous apparaissent maintenant plus complexes mais cette decouverte preliminaire a ouvert la voie a tout un champ d'investigation et a un ensemble de pratiques psychotherapiques. Le psychanalyste a conscience d'etre un therapeute et, en meme temps, un homme de science dans la mesure ou il lui est donne d'observer de telles transformations.

Cependant, tres souvent, la theorie psychanalytique de l'inconscient est consideree essentiellement d'un point de vue statique et intellectualiste. L'expression "rendre conscient l'inconscient" est entendue comme signifiant "transcrire dans un langage communiquable ce qui etait auparavant actif mais imperceptible et incommuniquable". Vue statique puisque l'accent est mis sur le dechiffrage d'un m ateriel immuable, vue intellectualiste puisque la decouverte de l'inconscient apparait comme le moyen et la fin de la psychanalyse et non comme un fait clinique dont il nous faudrait preciserles raisons de survenue et les effets. D'une observation psychologique nous passons a une ideologic de la connaissance de soi. Il est vrai que l'application de la psychanalyse a des faits sociaux ou de culture semble donner raison a un tel point de vue. On oublie souvent que la transposition de la methode d'interpretation suppose que Ton degage egalement une praxis qui permettrait de mettre a l'epreuve les hypotheses ainsi avancees - comme l'observation du changement clinique permet chez le sujet en psychanalyse de verifier la validite des interpretations.

Mais des raisons qui tiennent a la cure renforcent egalement ce point de vue. Dans la cure psychanalytique en effet, le psychanalyste est certes attentif aux changements qui operent et, comme nous le verrons, a la resistance a ces changements. Mais, en même temps, son interet porte sur l'ensemble du "monde des representations" d'un sujet. C'est ainsi qu'il decele les contradictions, les nonsens, les aspects incomprehensibles du comportement et qu'il peut proposer des hypotheses sur leur sens "latent en fonction du contexte. Si les progres de la connaissance psychanalytique passent necessairement par l'analyse sequentielle des faits, l'attention du psychanalyste dans la cure n'est pas dirigee en premier lieu vers elle. Au contraire, c'est la relation actuelle entre differents systemes permanents d'interets ou de representations qui constitue son champ d'observation. De maniere synchronique et non plus diachronique ces systemes s'organisent en un champ d'interactions que la psychanalyse etudie.

L'exploration de l'inconscient apparait, sous cet angle, comme l'investigation de ce qui fait defaut a une comprehension generate et coherente de la personnalite. Psychanalyste et patient percevront les progres de cette exploration en termes d'un progres de la connaissance, d'un approfondissement de l'observation, plutot qu'en termes de mutation, de changement. Il existe done une contradiction entre le point de vue diachronique, base de l'observation scientifique en psychanalyse, et le point de vue synchronique, sur lequel repose l'etude clinique au cours de la cure.

Cette contradiction n'est d'ailleurs pas propre a la psychanalyse. Elle se retrouve dans toute pratique psychotherapique qui repose sur la prise de conscience. Scientifiquement, la prise de conscience est un fait observable, survenant a un moment determine et produisant des effets reperables. Cliniquement, la prise de conscience devoile'et approfondit les aspects latents de la conscience de soi. Cette contradiction a pour effet de renforcer deux courants d'opinion opposes. De l'un qui ne verrait dans la psychanalyse qu'une manipulation du comportement, nousneparlerons pas. Mais l'autre, qui tend a hypostasier l'inconscient comme une substance, une realite ultime, renforce une vue cholastique et idealiste qui a legitimement souleve des critiques. Cette contradiction s'eclairera toutefois si nous approfondissons notre comprehension des processus de changement.

Le changement elementaire: La prise de conscience

Considered en termes de processus de changement, la psychanalyse presente une originalite certaine par rapport aux autres methodes psychotherapiques. On identifie habituellement les processus de changement en psychotherapie aux effets therapeutiques: attenuation ou suppression des symptomes, modifications des relations avec l'entourage sont les nouveaux buts de vie (Ticho) que le patient souhaite realiser grace au traitement. Or la psychanalyse ne tend pas directement, immediatement, a de tels buts. Son but premier est depermettre que se realisent dans la situation psychanalytique certains processus specifiques dont on escompte naturellement les effets therapeutiques. Comme le chirurgien, en modifiant certaines conditions anatomi-ques, escompte un benefice therapeutique ulterieur; comme le medecin, en modifiant certaines conditions chimiques du milieu interieur, escompte egalement un benefice therapeutique ulterieur, le psychanalyste attend de l'ехрerience nouvelle et originale qu'il va donner a vivre a son patient des effets therapeutiques secondares. Processus de changement specifiques et effets therapeutiques doivent done etre clairement distingues.

Dans cette perspective, la prise de consccience apparait bien comme un aspect essentiel de processus de changement. Mais on remarquera que, de ce point de vue, la prise de conscience n'apparait pas comme une technique therapeutique, mais comme un fait clinique. Prendre^conscience d'un souvenir, en apparence oublie, d'un desir et d'un fan'asme jusqu'alors inconnus, necessite que le sujet tolere le conflit interne que va inevitablement provoquer la reconnaissance de cet evenement oublie, de ce desir et de ce fantasme. Devenir conscient implique une nouvelle attitude vis a vis de soi-même. Le psychanalyste qui tente de communiquer au patient et de lui faire decouvrir cet element nouveau de la connaissance de soi, sait bien qu'il guerit rarement les symptomes par cette seule prise de conscience, mais qu'il offre ou patient des voies nouvelles de penser et de desirer lui permettant de mieux vivre avec le jeu contradictoire de ses desirs, liberte qui entrainera l'attenuation ou la liberation des symptomes.

Mais, ainsi considered, la prise de conscience revet une importance plus grande encore car, comme processus de changement, elle nous revele indirectement les resistances a ce changement. Les difficultes que rencontrent la prise de conscience tiennent avant tout aux resistances qui se developpent contre elle. Entre l'oubli vrai et le refoulement, qui est refus du souvenir, une des differences capitales tient a la menace que cree l'evocation du souvenir refoule. Ce que nous decelons, a un moment donne, des processus incons-cients a l'oeuvre chez un patient, temoigne de ses craintes a assumer des conflits ou des desirs irrealisables. Peur du conflit, peur d'etre submerge par des pulsions non maitrisables, sont en definitive les grands mobiles du refoulement et, plus generalement, des resistances a la prise de conscience.

On peut dire que le travail du psychanalyste consiste en l'analyse des resistances a la prise de conscience. Les resistances ou changement coincident avec les resistances que rencontre l'authentique liberte de penser et de desirer.

Les resistances au changement

On a pu dire (A. Freud) que la psychanalyse etait avant tout une experience negative, en ce sens que son objet immediat est defini par les obstacles que rencontre le processus de changement a se realiser.

Ceci est amplement illustre par la maniere dont Freud a decouvert la psychanalyse et dont il lа utilisee pour l'investigation clinique et la psychotherapie. Tout le long de son oeuvre, e'est la resistance au changement qui le preoccupe. Des les Etudes sur l'hysterie nous le voyons qui s'applique a comprendre les raisons des echecs que rencontre la methode cathartique. Au lieu d'exploiter au maximum les avantages de cette methode, d'en demontrer l'interet et d'en justifier l'application, en laissant a d'autres le soin d'en souligner les limites, il s'interesse avant tout aux echecs et aux difficultes techniques. En en cherchant les raisons, il decouvre le transfert, les mecanismes de defense et elabore la methode psychanalytique.

Nous avons appele equation fondamentale l'identite etablie par Breuer et Freud entre le symptome (plus une representation mentale dissimulee a la conscience) et la representation consciente. Cette equation est reversible, dans le sens de la pathologie par refoulement et dans le sens de la guerison par prise de conscience. Il vaudrait mieux d'ailleurs parler d'un systeme de transformations.

Mais, tres vite, apparurent les limites de cette decouverte et surtout le fait qu'elle ne prend pas en consideration les forces en presence, celles qui rnotivent le refoulement et font obstacle a la prise de conscience (resistance cu changement dans la cure) et celles qui facilitent la prise de conscience (facteurs de changement dans la cure). Ce que nous appelons, dans la theorie psychanalytique, deuxieme topiqueavu le jour autour de 1920. La distinction entre le moi, le cа et le surmoi est apparue comme un nouveau modele descriptif de la personnalite. De ce point de vue, on n'en a pas toujours vu la necessite et les critiques n'ont pas manque. C'est que Ton n'a pas discerne dans quelle logique interne elle s'inscrivait chez Freud. Reconnaitre et tolerer les pulsions contradictoires, bref accepter la dimension du conflit intrapsychique, c'est faire face a des systemes permanents de mobiles extremement puissants. Le besoin de se sentir coherent avec soi meme, maitre de ses pulsions et apte a composer entre les desirs et les pressions de la realite exterieure, constitue un systeme de motivations puissant qui lutte a l'occasion contre l'emergence de fantasmes ou l'evocation de desirs par trop incompatibles. D'ou la necessite de distinguer un ensemble d'attitudes qui definit un systeme au sein de la personnalite et que Ton appellera le moi, en opposition aux exigences pulsionnelles et aux formations imaginaires inconscientes du cа. Il en est de meme pour les exigences d'un ideal personnel qui constituent le sur-moi. Bref, ces instances ne constituent pas un modele descriptif de la personnalite, un de plus, mais un modele descriptif des systemes permanents de conflits et de tensions qui sont a l'oeuvre dans la conduite humaine. Ce sont les resistances au changement, c'est a dire a la prise de conscience qui ont rendu necessaire cette conceptualisation. Ce modele n'est d'ailleurs pas une formulation absraite; il rend compte d'attitudes concretes, observables ou aisement deductibles, dont il montre l'organisation. Oublier intentionnellement un souvenir particulierement charge de valeur affective, se sentir inferieur a l'image ideale de soi, s'irriter ou s'interesser a soi sont en effet des attitudes tout aussi concretes et reelles que les comportements diriges vers le monde exterieur.

Lorsque nous parlons de fonctionnement mental, nous ne parlons pas d'une mecanique d'idee, mais de cet ensemble d'attitudes concretes. Les attitudes ne sont pas l'expression d'entites psychiques, mais ce sont elles, conduites permanentes et structurees, qui definissent ces instances. En considerant comment ce modele personnologique freudien s'est developpe a partir de l'etude des resistances au changement, on evite ainsi le risque de reifier ces instances et on conserve a ces dernieres leur vrai statut: celui d'un systeme d'attitudes interieures, donnant matiere a des representations, des affects et des jugements.

La necessite d'un tel modele, avons-nous dit, s'inscrit dans la logique de la decouverte freudienne, a partir de l'etude des resistances au changement. Mais un concept theorique a joue un rôle decisif dans ce developpement, concept elabore par Freud autour de 1915 et qu'il a nomme introversion, reprenant ici un terme invente par Jung, mais utilise par ce dernier dans un sens different. Si l'importance de cette notion capitale n'est pas toujours reconnue, c'est que tres vite le developpement du nouveau modele personnologique lа fait oublier, alors que ce modele repose entierement sur elle. Ce qui resiste a la prise de conscience n'est pas seulement lie au caractere penible que reveterait sa reconnaissance. En outre le sujet jouit de ces attitudes interiorisees, en partie au moins inconscientes. Le fantasme inconscient est une source dejouissance quise dissiperait si le sujet, en prenant conscience de ce fantasme, ne pouvait qu'en chercher ou en imaginer la realisation. L'auto-critique qui rend sensible l'opposition entre le sur-moi et le moi satisfait, en meme temps, les tendances sadiques et masochiques. Ici quelle efficacite aura la prise de conscience pour faire renoncer le sujet a l'amenagement de drame interne ou de son identification aux deux protagonistes il tire une jouissance double et complementaire?

Illustrons d'un exemple clinique les faits auxquels nous nous referons. Sylvie n'ose pas me faire part de ses succes professionnels ni des ambitions qu'elle nourrit. Apres bien des hesitations elle concede qu'elle m'imagine deja en train de lui montrer a quel point ses ambitions sont damesurees. Elle retrouve bien la sa retenue, sa timidite habituelle. Son ambition ravive la rivalite avec le frere et ses craintes lui font evoquer la preference et le mepris que sa mere affichait quand il s'agissait d'opposer le frere et la soeur. Repetition? Sans doute, mais quel avantage trouve-t-on a le savoir? Ce qui est vecu dans l'analyse, Sylvie Га certes eprouve a de nombreuses reprises. Ce qui, par contre, lui semble maintenant plus clair, c'est qu'en adoptant vis a vis d'elle-même le meme jugement critique, elle se protege contre l'accu-sation supposee. Paradoxalement en se chargeant elle-même, elle sauvegarde son integrite et la haute opinion qu'elle a d'elle-même. Il lui faudra plus de temps pour sentir qu'en interiorisant la voix seche et meprisante de sa mere, non seulement elle se protege contre l'agression exterieure, mais elle n'est pas sans jouir d'un certain rapport sado-masochique qu'elle etablit avec elle-même. Sylvie decouvre ainsi progressivement comment une attitude dirigee contre elle-même resulte de l'interiorisation d'une attitude qu'elle a perdue ou apprehendee chez autrui. Et, fait peut-être plus important, elle decouvre egalement les jouissances qu'une telle relation, externe ou interiori-see, lui permet d'eprouver. La prise de conscience de l'interiorisation implique done que soient egalement percues sa visee defensive, ses liens avec une relation exterieure, et les plaisirs qui ont pu etre obtenus par cette relation. L'importance accordee ici a la notion d'interiorisation implique que nous attribuons un interet egal au mecanisme reciproque d'exteriorisation. Sylvie decouvre l'une en percevant l'autre. Plus precisement il nous faut ici distinguer ce qui est de l'ordre dela repetition et ce qui releve du deplacement. En s'attendant a l'ironie du psychanalyste, Sylvie projette sur lui ce qu'elle a toujours craint des substituts maternels. Elle reproduit une attitude. Mais en meme temps elle lui prete les memes sentiments que ceux qu'elle developpe vis a vis d'elle-même. On pourrait parler ici de projection que si l'attribution faite a l'analyste lui permettait de masquer sa propre culpabilite. Or, il est important d'etablir une difference entre la projection qui dissimule le conflit interiorise et l'exteriorisation qui deplace ce conflit sur la scene exterieure.

De ce point de vue, le conflit n'apparait plus comme une contradiction illogique, mais comme une donnee constitutive de l'etre, dont il souffre certes, mais dont il jouit par ailleurs. La force qui donne cohesion a ces systemes d'attitudes conflictuelles, systemes que caracterisent les notions de moi, de ca et de sur-moi est done egalement concrete, c'est la satisfaction que le sujet obtient en erigeant ces attitudes internes, sources de plaisir interieur, face au monde exterieur et a ses propres contradictions internes.

L'histoire de la pensee freudienne montre done que, si le role de l'inconscient et de la prise de conscient a fait decouvrir un modele de changement originel, l'etude des resistances a ce changement a mis en lumiere le pouvoir de la jouissance introvertie comme obstacle fondamental au changement. C'est a partir de la que s'est imposee une distinction nouvelle, celle des instances du moi, du ca et du sur-moi, pour rendre compte de ce systeme d'attitudes interiorisees.

Si nous avons insiste sur ces notions, dans le cadre du developpement de la pensee de Freud, c'est que dans sa pratique clinique, tout psychanalyste retrouve la necessite de cet ensemble de conceptualisations complementaires. L'objectif fondamental demeure bien la prise de conscience: nous cherchons toujours a developper chez le patient sa capacite de sentir et d'exprimer aussi librement que possible des systemes de representations, de pensees et de desirs. Mais, la resistance que nous rencontrons tient a des attitudes internes, a des complicites et des antagonismes entre les systemes de jugement, de motivations ou de conduites interiorisees dont le sujet ne se detache qu'avec difficulte, au prix de certains renoncements que la force de la prise de conscience n'est pas toujours assuree de vaincre.

Au cours de l'analyse, les associations regrediantes nous conduisent a des noyaux de fantasmes qui trouvent leur satisfaction dans leur simple evocation. Mais tirer plaisir de telles representations releve en fait de deux mecanismes distincts. A un pole nous anticipons le plaisir qui se realisera quand nous trouverons dans la realite l'objet ou la situation correspondant au fantasme. Cette realisation depend d'un accomplissement materiel ou symbolique de la scene, voire d'une simple connivence avec un tiers. Dans de telles situations l'evocation de la scene fait naitre un plaisir de type "plaisir preliminaire". Le sujet jouit de la scene, mais ce plaisir accroit la tension et le desir. А l'autre pole le plaisir surgit par la seule activation de la representation, en l'absence de toute realisation exterieure. Le sujet jouit pleinement de la simple illusion de la realisation du desir. Cette distinction est assez bien illustree en clinique quand nous etablissons la difference entre l'acte symptomatique et la formation du symptome nevrotique (Formation du substitut). Derriere l'acte symptomatique, ce qui demeure inconscient c'est la demande qui s'adresse a l'objet reel. Le sujet ecarte de la conscience les connexions a ssociatives qui permettaient de la reveler. Face a l'objet reel, la conduite est troublee par cette meconnaissance. La prise de conscience mobilise des affects penibles lies aux conflits et suscite un etat mele ou se confondent la reconnaissance du desir et le refus. Derriere le symptome nevrotique, c'est la realisation hallucinatoire du desir qui se developpe. Le sujet protege cette realisation en meme temps qu'il se defend contre les affects de deplaisir lies aux conflits. L'element qui differencie la formation "nevrotique" de Facte symptome c'est done le degre d'interiorisation de la jouissance. Dans un cas le plaisir ne tient qu'a l'anticipation de la realisation. Dans l'autre, il est tout entier dans la realisation hallucinatoire. La difference ne repose pas essentiellement sur des donnees phenomenologiques. Peut-on d'ailleurs parler de plaisir? Il serait peut-être plus juste de parler en termes de decharge et de tension. Mais certaines donnees cliniques renforcent cette hypothese metapsychologique. Le plaisir preliminaire est aisement reperable et accompagne de tres nombreuses activites mentales conscientes. Mais la satisfaction hallucinatoire n'est pas non plus toujours inconsciente. Elle caracterise egalement certaines reveries diurnes et certaines fantaisies preconscientes. L'opposition entre fantasme introverti qui trouve le plaisir dans sa propre activation et fantasme extraverti qui pousse a la realisation correspond sans doute a deux caracteristiques opposees de l'activite fantasmatique. La distinction extraversion-introversion (pour reprendre la terminologie utilisee par Freud dans les conferences introductives) ne coincide done pas avec celle entre preconscient et inconscient. Certaines fantaisies a forte composante d'introversion demeurent preconscientes tandis que des representations dirigees vers l'objet peuvent etre inconscientes. Mais l'experience montre que les fantasmes inccrscknts intrcvertis constituent un systeme de representations dont les effets sur le fonctionnement mental s'expliquent en partie par l'interiorisaticn du plaisir. L'importance de ce critere economique est parfois negligee. Or, on risque d'oublier que le symptome nevrotique, ou plus precisement la formation de substitut, a comme premier avantage ce plaisir interne auquel le sujet demeure attache. A la meconnaitre, on reduit l'explication du symptome nevrotique aux benefices secendaires, et la cure a une dialectique de la demande et de la relation d'objet. Cette reduction me semble caracteriser une des formes du glissement vers le banal et le trivial queconnait actuellement la psychanalyse. Elle trouve, il est vrai, un support dans le fait, sur lequel nous reviendrons, qu'au sein de la relation psychanalytique le transfert permet le deplacement de la jouissance introvertie vers une demeure qui s'adresse a un nouvel objet. Mais cette demande transferentielle resulte d'une exteriorisation qui mobilise precisement la jouissance interiorisee.

Ce que nous venons de voir a propos de la fantaisie inconsciente inscrite dans le ca s'applique evidemment aux structures du moi et du surmoi. L'introversion correspond a une forme d'interiorisation et le systeme des fantasmes introvertis constitue une des structures de l'appareil psychique. Certes on pourrait objecter que les fantasmes introvertis jouent un role important surtout dans les structures nevrotiques alors que la differenciation du moi et du surmoi est un fait constant. Mais precisement on peut se demander si la rigidite de ces structures chez certains sujets ne tient pas en partie a cette intensite des investissements d'objets interiorises.

Autre changement elementaire: L'exteriorisation

Il nous faut maintenant completer le modele du changement elementaire qui, au depart, reposait essentiellement sur la prise de conscience. Changer, c'est aussi, en psychanalyse, renoncer a certaines attitudes interieures, a la jouissance qu'elles apportaient, même si ce plaisir ne se laissait guere voir derriere les souffrances secondaires qui poussent le patient a demander de l'aide. Abandonner les mises en scene interieures au profit d'une demande tournee vers la realite exterieure est une entrepries difficile car tout desir ne peut etre satisfait, certains sont incompatibles en raison d'exigences contradictoires, d'autres ne trouveront jamais, dans la realite, une possibilite de satisfaction. Rever en sachant que toute realisation est impossible, desirer en acceptant de ne pas etre satisfait, demander en s'exposant au refus, renoncer a Taction immediate, a la decharge impulsive constituent le prix dont il faut s'acquitter pour acquerir lucidite et liberte devant ses pulsions et ses conflits. C'est un prix leurd a payer, meme pour celui qui souffre de conflits nevrotiques. D'ou l'interet des processus de transfert qui aident a la realisation de ce changement et facilitent les effets de la prise de conscience. Il est preferable de parler des processus de transfert que de transfert carles faits que recouvre cette notion sont complexes et probablement assez disparates. Ce que nous avons a en dire ici est d'ailleurs un bon exemple de l'heterogeneite de ce concept. En effet, trop souvent, on envisage sous le terme de transfert les mecanismes de repetition qui font que, dans la situation de la cure psychanalytique, le patient reproduit des comportements du passe. Il у a'bien transfert puisque deplacement; deplacement d'un attachement (ou d'un rejet) du passe a un lien present qui ne justifie pas la nature de la relation therapeutique.

Relation neutre et vide au depart, cette derniere facilite d'ailleurs la precipitation des transferts. En ce sens, la psychanalyse ne fait qu'intensifier un mouvement general a la vie. Car, en toutes circonstances, nous sommes amenes a repeter, a revivre, et tout specialement, les situations qui sont particulierement heureuses ou celles qui ont cree un sentiment d'echec, une blessure narcissique. L'etablissement de transferts par repetition est done utile dans la cure car la prise de conscience aide le sujet a s'en degager dans la situation meme ou ils sont ainsi revecus.

Mais, plus importants, sont les transferts par exteriorisation. Ce que le sujet vit dans la relation avec le therapeute n'est pas seulement la repetition directe de ce qu'il a vecu en d'autres circonstances, mais l'exte'riorisation dans une relation avec une autre personne de ce qui etait interiorise et vecu dans le simple rapport avec soi-même. Au depart, le sujet attribue au psychanalyste des roles qu'il tient egalement vis a vis de lui-même. Il lui prete son esprit critique ou son indulgence, sa volonte ou son pouvoir de tout maitri-ser, il projette ses propres desirs. Mais, un des effets de ce processus est que dans les cas favorables, ce mouvement d'exteriorisation allege le poids des structures internes et que le deplacement est complet. L'auto-accusation disparait au profit d'un sentiment de honte ou d'une crainte al'egard du psychotherapeute ressenti comme accusateur, la jouissance introvertie laisse la place a une demande qui s'adresse au psychotherapeute.

C'est en ce sens que Freud a pu dire que la nevrose clinique laisse la place a une nevrose de transfert. Cliniquement en effet, le patient juge qu'il va mieux, ses symptomes s'attenuent ou disparaissent, pes conflits internes s'allegent. Tout irait bien si la situation analytique elle-même n'etait pas devenue le lieu des difficultes et des conflits. Ce processus d'exteriorisation transferentielle est done symetrique d'un processus d'introversion ou d'interiorisation. Par ce dernier, le sujet developpe des attitudes internes qui reproduisent un mode de rapport avec autrui, Par l'exteriorisation transferentielle le sujet deploie, dans la relation therapeutique, cette relation interiorisee. Ainsi, au couple refoulement-prise de conscience s'ajoute le couple interiorisation-exteriorisation comme modele elementaire du changement psychanalytique.

Un exemple clinique illustrera cette identite de structure entre le transfert et la nevrose. Dans la situation analytique, Bernadette, femme mariee de la quarantaine, edifie un systeme de relation tres stable et tres defensif avec l'analyste. Consciemment s'y melent des sentiments tres vifs d'admiration, une dependance passive et la crainte d'etre abandonnee quand Ton s'apercevra qu'elle est sans valeur et sans interet. En realite, l'analyse permet de degager progressivement des elements transferentiels inconscients organises autour de la rivalite phallique. L'idealisation de l'analyste reflete et dissimule l'idealisation de son propre phallus imaginaire qu'elle represente par ses hautes exigences intellectuelles, son energie, sa volonte... Sa passivite apparait comme une formation reactionnelle destinee a lutter contre ses tendances actives. Sa peur d'etre abandonnee, enfin, reflete sa crainte de voir ses aspirations a la domination active reduites a neant par la critique et la moquerie des hommes. La decouverte progressive de cette organisation transfe - rentielle la conduit a s'arreter sur une fantaisie qu'elle entretient depuis de longues annees: celle d'etre un religieux, austere et redoute, vivant en solitaire dans un monastere.

Elle est nee un an apres la mort d'un frere, decede а l'age de 10 ans et considere par les siens comme un garcon extraordinairement brillant. Il est d'ailleurs facile de rapprocher la rivalite phallique revelee dans le transfert des emois infantiles lies a sa situation familiale. Mais il est temps maintenant d'en venir aux symptomes qui conduisirent Bernadette a l'analyse. Elle souffrait depuis plusieurs annees d'une depression grave pour laquelle elle avait ete hospital isee a plusieurs reprises. Apres avoir fait des etudes superieures brillantes et accede a une position professionnelle tres honorable, elle demeurait inactive, entierement occupee a mediter sur sa decheance et n'eprouvant plus aucun intêret pour sa profession ni pour aucune autre tache. L'analyse permit de voir que ce qui se dissimulait derriere sa depression coïncidait avec les sentiments mêles qui s'exteriorisaient dans le transfert. Elle gardait au-dedans d'elle, objet interiorise du deuil, l'illusion de la puissance phallique qu'elle avait herite de son frere mort. Depressive, elle conservait l'illusion de la garder en soi sans l'exposer aux risques de la vie quotidienne. Depressive, elle pouvait croire a sa force et a son intelligence masculine, d'autant plus qu'elle en differait l'emploi.

Cette breve observation montre bien comment coincident l'oganisation conflictuelle qui sous-tend la depression nevrotique et celle qui sous-tend le transfert. Or a mesure que la premiere s'intensifiait dans la cure, la seconde s'attenuait. Apres un an d'analyse, la depression nevrotique avait presque disparu totalement en même temps que les difficultes etaient extremes dans la relation therapeutique. Ainsi, l'analogie de structure entre la nevrose et le transfert se trouve etablie non seulement par une identite de preoccupations et de conflits, mais egalement par un lien diachronique.

Bien des manifestations de transfert ne laissent pas voir un tel enchaînement, car les conduites homologues qui les ont precedees etaient trop nombreuses et demeuraient diluees dans le comportement general. En outre un facteur quantitatif intervient: l'attitude transferentielle peut constituer l'analogue d'attitudes existantes sans leur oter leur propre charge affective et done sans se substituer a elles. Une mutation comme celle que nous rapportons dans le cas de Bernadette necessite une forte concentration des investissements sur les fantasmes lies auconflit nevrotique, et aussi un fort deplacement quantitatif dans la situation therapeutique. Conditions qui n'en font peut-être qu'une dans l'hypothese ou les deux processus seraient etroitement correles. Le terme de nevrose de transfert designe cette organisation transferentielle ou les conflits s'inscrivent franchement dans la relation therapeutique. On constate alors un balancement net entre la symptomatologie anterieure et le conflit active dans la situation de transfert.

Il est vrai que l'exteriorisation transferentielle n'a pas en soi une grande valeur therapeutique dans la rresure ou le sujet se trouve ainsi pris dans une relation tout aussi conflictuelle et pathologique. Si la repetition se resoud par detachement vis a vis des objets infantiles et attachement a de nouveaux objets, l'exteriorisation ne peut que laisser place, avec la fin de l'analyse, a un nouveau processus d'interiorisation. Le but de la cure est alors d'aider le sujet a se degager des relations pathogenes exteriorisees dans le transfert pour que l'interiorisation finale laisse une modification de structure. L'exemple le plus clair d'un tel processus a ete donne par Strachey des 1936 quand il a insiste sur l'analyse des exigences surmoiques exteriorisees et sur l'interet therapeutique fundamental de l'interiorisation d'instances critiques depourvues d'agressivite.

Revenons au cas de Bernadette. En evoquant dans l'analyse toutes les formes que prirent durant son enfance son rapport avec le frere mort, elle retrouva des scenes, des impressions et des pensees qui semblaient effacees. En particulier celles qui concernaient son desir, sa certitude même, d'avoir herite de ce frere une condition masculine qui la rendait absolument differente de sa mere et de ses soeurs ainees. C'est cette condition qui la mettait dans un rapport particulier avec les hommes ou l'identification et la rivalite se substituaient a tout rapport veritablement heterosexue. Cette rememoration ne correspondait evidemment pas a une situation traumatique unique dont elle aurait du se liberer. Elle cristallisait et fixait dans des souvenirs du passe une position dont elle se degageait progressivement en decouvrant le sens qu'elle pouvait attribuer a ses emois actuels, suscites par la relation transferentielle. Tout ceci serait demeure une construction de l'esprit si elle n'avait senti pleinement l'identite des sentiments, assimilant ceux du present a ceux dont le souvenir lui revenait.

Ainsi le travail de l'analyse, si Ton considere le chemin qui va de retroversion nevrotique a la dialectique transferentielle et a l'ancrage de cette dialectique dans l'histoire, repond en definitive a deux objectifs principaux. Il substitue a l'illusion d'un desir qui se realiserait dans l'evocation hallucinatoire du fantasme inconscient l'experience d'un desir insatisfait, source de conflits, qui s'exprime dans l'evocation de fantaisies conscientes et de scenes passees. Plus radicalement, il substitue au compromis qui masque le conflit en condensant dans des symptomes et des fantasmes les expressions pulsionnelles incompatibles, la perception de ce conflit.

On peut d'ailleurs se demander si la psychanalyse est la seule situation qui permet a des attitudes interiorisees en s'exteriorisant dans une situation interpersonnelle nouvelle de donner prise a Interpretation qui permet au sujet de s'en degager et de reorganiser son mode de fonctionnement mental. Il est vraisemblable que la vie permet egalement de telles evolutions. Il est probable que les etudes sur le "vieillissement" de la pathologie mentale nous montreront des processus de cet ordre. De meme des variantes psychotherapiques peuvent obtenir, comme nous le verrons, des modifications compara-bles.

Mais il est evident que ce processus de changement, de l'interiorisalion a Texteriorisation, connait des limites: l'application de la psychanalyse a des structures pathologiques autres que la nevrose (psychoses, psychopathies, nevroses de caractere, personnalites narcissiques) nous montre les particulates et les difficultes que rencontre ce processus de deplacement. Nous sommes ici confronted a une des principales limites de "l'analysabilite" - Bien entendu la repetition et la capacite de mobilisation des attachements tiennent aussi a d'autres causes (facteurs biologiques et sociaux en particulier). Mais revenons a la comparaison entre la psychanalyse et d'autres formes de psychotherapie. Il ne semble pas que la dimension de l'inconscient et le role de la prise de conscience jouent a cet egard un role discriminatif. Il s'agit la de donnees qui entrent en ligne de compte dans de nombreuses formes de psychotherapies.

Par contre repetition et exteriorisation sont des processus qui s'observent de maniere variable d'une therapie a l'autre et ces differences nous permettent sans doute de mettre un peu de clarte dans les processus de changement en psychotherapie. Tout changement necessite que le sujet abandonne certains attachements et en etablisse de nouveaux plus conformes a ses aspirations et aux possibilites de realisation. Pour que nous puissions, par la prise de conscience, mobiliser ce processus, il faut que nous trouvions chez le patient une force suffisante qui le pousse a realiser ce processus, une souffrance, un besoin de realisation. Lorsqu'on concentre ses efforts sur les relations du sujet avec son entourage, le probleme est relativement simple. Evaluer la capacite de changement du patient, la force reelle de son desir de trouver de nouveaux buts de vie, celle de se detacher des buts anciens, souvent des nostalgies de l'enfance ou de l'adolescence, constitue meme une des taches de la psychotherapie.

Le travail psychotherapique se heurte en definitive a deux obstacles. Un, dont nous venons de parler, est le poids des fixations, des attachements aux objets. L'autre tient aux attachements interiorises qui constituent la personnalite du patient. Les attaquer de front en les interpretant directement aide parfois le sujet a s'en degager mais, en regie generale, le degre de fixation est ici plus fort, la mobilite des investissements moins grande que dans les relations d'objet exteriorisees. Bien des psychotherapies echouent parce qu' elles se heurtent a ces resistances des instances psychiques et que, en depit de la comprehension que peut avoir le psychotherapeute, le sujet tire trop de satisfactions de son mode de relation avec lui-meme pour pouvoir changer. C'est dans ces cas que la situation psychotherapique devra donner au patient l'occasion non seulement de repeter ce qu'il a vecu en d'autres circonstances, mais d'exterioriser dans un rapport avec autrui ce qui se vivait en lui, dans un jeu de relations entre instances psychiques partielles.

La psychanalyse a pour but de creer une telle situation. Elle у echoue parfois et peu de choses different alors entre la situation pseudopsychiatrique et une psychotherapie orientee vers l'analyse des rapports avec le monde environnant. Inversement, il n'est pas toujours necessaire de creer une situation psychanalytique standardised pour que ce processus d'exteriorisation transferentielle s'etablisse et apporte ses fruits. On ne saurait trop souligner l'interet d'abandonner ici une reference trop stricte a des methodes de psycho therapie pour mieux etudier les processus de changement a l'oeuvre, Les concepts d'exteriorisation et d'interiorisation semblemt a cet egard tres importants.

Nous constations au depart une contradiction. Le psychanalyste, en tant qu'homme de science, observe les changements consecutifs a certaines interventions et cherche a determiner l'equilibre des forces qui freinent ou facilitent ces changements. Le psychanalyste, en tant que clinicien, observe une totalite: la personnalite de son patient, et cherche a en comprendre la structure de maniere plus complete et plus vraie. Cette contradiction explique qu'une des difficultes de travail du psychotherapeute est d'être attentif a des donnees cliniques qui s'inscriront ainsi dans des perspectives diachroniques et synchroniques opposees. Cette contradiction se retrouve dans les travaux scientifiques psychanalytiques ou le traitement des donnees implique souvent une confusion de ces deux plans. Ce que nous avons etudie eclaire peut-être d'un jour nouveau cette conntradiction. La prise de conscience s'inscrit bien dans un mouvement de connaissance de soi ou d'autrui. Mais sa survenue mobilise les attachements du sujet a la condition qu'elle s'applique a une situation instable, prete au changement en raison des motivations du patient. Savoir donner une interpretation c'est certes comprendre le sens de la conduite concernee, mais aussi juger du moment ou l'equilibre des forces d'attachement exteriorisees et interiorisees est tel que ce sens nouveau reorganise de maniere significative le jeu de ces forces. La prise de conscience ne peut pas etre abstraite de ce jeu dynamique concret sur lequel elle a prise.

Pour le psychanalyste, il n'y a pas d'interpretation possible sans reperage des facteurs dynamiques et economiques qui reglent les processus de changement et de resistance au changement.

Resume

La psychanalyse, tant comme methode psychotherapique quecomme moyen d'investigation de la personnalite, se donne pour objet certains changements de comportement. Ces changements sont habituellement decrits en reference a la notion d'inconscient. Cependant, tres souvent, la theorie psychanalytique de l'inconscient est consideree essentiellement d'un point de vue statique et intellectualiste. L'expression "rendre conscient l'inconscient" est entendue comme signifiant "transcrire dans un langage communiquable ce qui etait auparavant actif, mais imperceptible et incommuniquable". Toutefois, la prise de conscience qui constitue un aspect essentiel du processus de changement doit etre avant tout consideree comme un fait clinique. On peut dire que le travail du psychanalyste consiste en l'analyse des resistances a la prise de conscience. Les resistances au changement coincident avec les resistances que rencontre l'authentique liberte de penser et de desirer.

Une etude des resistances au changement montre Г importance du modele personnologique. Changer c'est aussi, en psychanalyse, renoncer a certaines attitudes interieures, a la jouissance qu'elles apportaient, meme si ce plaisir ne se laissait guere voir derriere les souffrances secondaires qui pous-sent le patient a demander de l'aide. Il est interessant d'appliquer ces concepts a l'etude des processus a l'oeuvre dans les differentes psychotherapies. Cette etude nous permet aussi de surmonter la contradiction entre une approche scientifique des changements et l'etude clinique de la personnalite.

Bibliographie

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Ticho, E. Termination of Psychoanalysis: Treatment Goals, Life Goals. The Psychoanalytic Quarterly, Volume XLI, 1972 № 3.

Widlocher, D. Freud et le Probleme du Changement. Presses Universitaires de France, 1970.

Widlocher, D. Transfert et Exteriorisation. Connexion, 1973 8-9-22.

Widlocher, D. Interiorisation et Processus Therapeutique. La Psyche, Nouvelle Revue de Psychanalyse - Automne 1975.

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